Afin de sortir de la période désagréable engendrée par la situation financière de la ville et la hausse d’impôts de 30%. En montant au créneau fortement, indiquant qu’il ne respecterait pas la loi, retrouvant le ton de son appel lancé au Montgenèvre, lorsqu’il avait incité les migrants à passer les frontières. "Nous continuerons l’hébergement inconditionnel", a-t-il déclaré solennellement à l’Hôtel de Ville, muni de son écharpe de Maire.
En parallèle celui qui a été qualifié de "parrain de la majorité" par Libération, Raymond Avrillier a lui aussi renoué avec ses origines trotskistes, ses méthodes de militant anti-nucléaire acharné, en brandissant vendredi devant le Conseil Métropolitain un portrait du Maréchal Pétain avec une liste d’élus désignés à la vindicte populaire, certains d’entre eux se découvrant solidaires d’une loi sur laquelle ils ne se sont pas prononcés, envisageant de déposer plainte pour diffamation.
Compte-tenu de l’organisation très centralisée de la majorité municipale, ces actions concomitantes ne sont pas un hasard. Il s’agit de l’essai d’une reprise en mains sur des bases idéologiques, une posture qui sied mieux à la majorité municipale que la gestion de la vie quotidienne des Grenoblois.
Les élus municipaux PS ont trouvé là l’occasion de se rapprocher d’elle en se joignant bruyamment à la protestation, par la voix de Hassen Bouzeghoub. Du côté de LFI il était impossible de se démarquer de la ligne du maire, la même que celle de Jean-Luc Mélenchon sur ce sujet. Alors que les premiers sont très divisés sur l’après Piolle – alliance ou pas avec son successeur ? - et les seconds dubitatifs depuis que le maire de Grenoble a affirmé que Jean-Luc Mélenchon ne pouvait plus être le candidat de la gauche.
Lors du conseil métropolitain de vendredi, l’autre gauche menée par Christophe Ferrari le président de la Métropole a exprimé une solidarité de principe à ce marqueur traditionnel de ce camp, mais n’a pas embrayé sur l’opération politique. Au final une trentaine de personnes seulement avaient répondu à l’appel de l'édile à se rassembler le 22 décembre à l’Hôtel de Ville.
En effet une partie du secteur associatif qui a pris en mains la défense des migrants est dirigé par des militants de l’extrême gauche, ex Ligue Communiste Révolutionnaire ou actuel NPA, en concurrence avec les élus de la gauche extrême qui siègent à l’Hôtel de Ville, bien décidés à ne pas les aider. De son côté Raymond Avrillier était bien seul devant la Métropole.
Si le "cadeau de Noël" est le bienvenu maintenant, ses effets bénéfiques ne sont donc pas assurés sur le moyen terme. La municipalité de Grenoble a ainsi essuyé nombre de critiques depuis l’appel aux migrants lancé du Montgenèvre par Eric Piolle en 2018 : à chaque squat, campement, bidonville, elle est interpellée sur les moyens mis en œuvre pour accueillir "toute la misère du monde". Dont elle ne dispose évidemment pas. L’écart entre les pétitions de principe et les réponses concrètes ne devrait pas se réduire dans les années qui viennent, avec des situations humaines très difficiles.
Mais Eric Piolle qui ne peut plus être - du fait des statuts d’EELV - candidat à sa succession, peut espérer que sa position de principe sera bénéfique à son destin politique national, vers lequel il est toujours tourné. Tandis que sa majorité et ses candidats ,eux, auront toujours à faire face aux problématiques pratiques posées par cet accueil de populations migrantes.
Le coup de fusil a donc été tiré avant la trêve de fin d’année, permettant de se rétablir médiatiquement. Les élus grenoblois peuvent juste craindre que les mêmes causes – des déclarations enflammées- ne produisent les mêmes effets : des difficultés considérables en matière de logement et d’intégration dans des quartiers de la ville de plus en plus soumis à une forte pression migratoire. Pour transformer l’essai, la municipalité grenobloise devra se donner maintenant les moyens d’y répondre.